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Par le truchement de la recirculation de toiles fabriquées en Chine, Jacko Restikian explore le concept de la postproduction et le rapport entre la production, le producteur et l’usager. Il transformera l’espace de la Galerie en un magasin symbolique où l’on vend, à prix modique (1 $ - 1,25 $), des petites toiles vierges fabriquées en Chine. Pendant l’événement, l’artiste utilisera ces toiles comme objets de performance, et comme accumulation d’un « ready-made » dans l’espace d’exposition. Il invitera les visiteurs de la Galerie et deux performeurs (Christian Bujold et Geneviève Senécal) à faire usage de l’espace et des toiles, selon certaines balises, non comme simples participants, mais plutôt comme producteurs individuels et collectifs de l’œuvre elle-même.

En outre, le rapprochement entre l'installation et l'aire d'accueil de la Galerie associe la vente de ces toiles à la diffusion des éditions de catalogues et de livres d'art. Cependant, la signification de cette association symbolique et métaphorique se transforme du moment qu'on amorce la vente des toiles, car alors l'installation devient un potentiel d'absence. Le vide probable de la salle, après la vente, défait conceptuellement les corrélations contenu et contenant, exposant et exposé. En revanche, il met en relief la dialectique présence et absence qui annonce l'usager comme consommateur et producteur, dé-constructeur et constructeur. D'ailleurs, la fonction de la toile qui fait référence à la peinture est infléchie, même trahie par la vente qui insiste sur sa valeur d'échange commercial. La toile devient le signe à la fois d'un potentiel d'espace pictural et d'une marchandise en circulation. Les acheteurs des toiles, les performeurs et l'artiste, associés à des transporteurs, en expérimentent la charge et la valeur sociale et esthétique.

Ici, le titre Made in China s'ajoute comme une équivalence du mythe du « bon marché » dans la nouvelle économie symbolique et matérielle du management néolibéral. En effet, la Chine est évoquée non pas comme une histoire d'une société (qui nous échappe) mais plutôt comme un signe de délocalisation, c'est-à-dire de déplacement des ressources humaines, matérielles et naturelles.

Se fonder sur le constat que le processus de la recirculation est une postproduction semble à l'artiste une stratégie qui permet de soulever des questions sur le produit socioculturel, le mode de production, le producteur et l'usage. En se basant sur un concept de Nicolas Bourriaud, il définit la postproduction comme étant une production secondaire, une attitude d'utilisation du bagage et des données culturels existants, qu'ils soient matériels ou conceptuels. La recirculation de la toile et son mode d'emploi créent un contexte ambigu esthétique et fonctionnel. La postproduction comme un acte d'usage pensé et développé peut-elle brouiller ou ébranler l'identité du producteur, de l'artiste?

Notes biographiques Jacko Restikian est un artiste multidisciplinaire. Originaire du Liban, il vit et travaille à Montréal depuis six ans. Son travail a été présenté au Québec (Galerie Mai, B-312 et Le Lobe) et à Beyrouth (Espace SD, Zico House). Il achève, avec Made in China, ses études de maîtrise à l'École des arts visuels et médiatiques de l'UQAM.